IndependentWHO – Santé et Nucléaire

«L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ne remplit pas sa mission de protection des populations victimes des contaminations radioactives.»

2 - avril - 2013

Le docteur Alex Rosen de la section allemande de l’Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IPPNW) a publié, le 1er mars 2013, une analyse critique de l’évaluation par l’OMS du risque pour la santé dû à la catastrophe nucléaire de Fukushima.

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Le 28 février 2013, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié son « Evaluation du risque pour la santé dû à l’accident nucléaire après le tremblement de terre et le tsunami du grand Est du Japon ». Ce rapport conclut que « pour l’ensemble de la population à l’intérieur et à l’extérieur du Japon, les risques prévisibles sont faibles et aucune augmentation visible du cancer au-delà des taux de base n’est envisagée »(1). L’évaluation est établie sur des estimations de dose préliminaire, publiée par l’OMS en mai 2012 (2), sévèrement critiquée par la section allemande de l’AIMPGN (l’Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire), des chercheurs indépendants et des organisations citoyennes japonaises (3). L’analyse présentée ici traite des huit principales objections au rapport actuel de l’OMS et montre pour quelles raisons on ne peut pas le considérer comme une évaluation scientifique neutre des véritables risques pour la santé des populations touchées, ni comme une base valable pour de futures décisions et recommandations.

1. Le rapport est établi sur des hypothèses erronées

Du point de vue scientifique, la critique principale de ce rapport tient au fait que l’évaluation du risque pour la santé est établie à partir d’évaluations de dose qui sont douteuses, pour ne pas dire entièrement fausses. Les estimations de « terme source » (l’émission totale de particules radioactives) utilisées dans le rapport de l’OMS sont considérablement moins élevées que celles d’institutions de recherche indépendantes et même dans certains cas plus faibles que les propres mesures de TEPCO. L’exposition de la population vivant dans la zone des 20 kms autour de la centrale nucléaire a été omise, même si cette population a pu être exposée à de hauts niveaux d’iode-131 avant et pendant de chaotiques évacuations. La quantité et le choix des échantillons de nourriture utilisés pour les calculs de la dose de radiation interne se sont révélés inadéquats et en contraste absolu avec les échantillons publiés par les autorités japonaises. Enfin, et sans doute plus crucial, le rapport a été constitué par des scientifiques qui travaillent pour des organisations ayant des intérêts à un usage permanent et lucratif de l’énergie nucléaire, ce qui jette un doute sur la neutralité des résultats de ce rapport. Toutes ces critiques plus détaillées peuvent être trouvées dans le rapport de la section allemande de l’AIMPGN intitulé «  Analyse du rapport de l’OMS sur la catastrophe de Fukushima », accessible gratuitement en ligne (4). Aussi experte soit la manière de l’entreprendre, un calcul de risques pour la santé ne peut pas être plus exact que les hypothèses sur lesquelles il est établi. Une évaluation qui dépend de données dont la validité doit être contestée pour des raisons de manque de neutralité, d’échantillonnages sélectifs, de distorsion et d’omission de faits pertinents, ne peut pas être acceptée par la communauté scientifique comme une base sur laquelle établir des recommandations pour la santé.

2. Le rapport ignore les risques pour la santé des populations hors de Fukushima.

Alors que la radiation se répandait sur un vaste territoire du nord-est du Japon, y compris la métropole de Tokyo, et que les aliments, la terre et les déchets contaminés étaient dispersés au-delà de la zone de la préfecture de Fukushima, seules les quatorze zones résidentielles les plus touchées (les groupes 1 et 2 du rapport de l’OMS) ont été prises en compte pour l’évaluation complète du risque pour la santé (5), invalidant ainsi tout effet mesurable sur la santé de la population du reste de la province de Fukushima, du Japon et du monde. De fait, le rapport proclame que « hors des zones géographiques les plus touchées par la radiation, même dans des lieux situés dans la préfecture de Fukushima, les risques prévisibles restent faibles et aucune augmentation visible du cancer au-delà des variations naturelles des taux de base n’est envisagée ».

Cependant, nous avons appris de la catastrophe de Tchernobyl que même si les populations les plus touchées sont celles qui vivent dans les zones fortement contaminées par les retombées, beaucoup de personnes vivant dans les zones moins contaminées de l’ancienne Union Soviétique, de l’Europe et de l’Asie Mineure ont aussi été affectées, entraînant une augmentation de la morbidité et de la mortalité (6) . Comme les effets des radiations à faible dose sur la santé sont stochastiques par nature et que la méthode généralement acceptée pour calculer le risque de cancer est le modèle linéaire sans seuil (LNT), l’exposition d’une faible population à une forte dose de radioactivité peut avoir des résultats similaires, en nombre absolu de cas de cancer, à l’exposition d’une vaste population à une radioactivité relativement basse. Bien que les effets de petites quantités de radiation à faible dose sur de vastes populations soient en général plus difficiles à détecter par des études épidémiologiques, le fait de ne pas les prendre entièrement en compte néglige un grand nombre de cas en valeur absolue et ne peut seulement être vu que comme une tentative de minimiser les effets attendus de la catastrophe nucléaire sur la santé.

Dans le cas de Fukushima, le niveau élevé de contamination maritime par les fuites, l’évacuation délibérée de déchets hautement radioactifs et les retombées doit être pris en considération, surtout en raison du rôle important que jouent les produits de la mer, poissons ou algues, dans l’alimentation japonaise. Les niveaux de césium radioactif mesurés dans les bars (poissons) du Pacifique nord ont continuellement augmenté de mars à septembre 2011, avec une contamination maximum de 670 Bq/kg mesurée le 15 septembre 2011 (7). Avec une contamination maritime totale d’environ 15-27 PBq, les retombées de Fukushima constituent le seul rejet aussi radioactif jamais enregistré dans les océans (8 – 9 – 10). Comme nombre d’échantillons de nourriture et de résultats cruciaux n’ont pas été inclus dans la première évaluation de dose, l’importance des produits contaminés de la mer n’a pas été correctement prise en compte pour la population hors de la préfecture de Fukushima dans le rapport actuel de l’OMS.

3. La poursuite des émissions radioactives n’a pas été incluse dans l’évaluation

Le rapport de l’OMS traite la catastrophe nucléaire de Fukushima comme un événement unique et ne prend pas en considération la poursuite des émissions de radioactivité après les fusions initiales de mars 2011. Dans le rapport d’évaluation de dose de l’OMS de mai 2012, les auteurs ont écrit que « la contribution de l’iode à l’exposition totale a été considérée comme nulle après le quatrième mois suivant le début des rejets ». Ceci présuppose que les rejets d’iode radioactif se sont produits uniquement au tout début de la catastrophe et qu’ensuite il n’y en a plus eu, permettant la chute des niveaux d’iode-131 à cause de la décroissance de la radioactivité. Cependant, en juin 2011, les scientifiques du gouvernement japonais ont encore trouvé des concentrations d’iode-131 supérieures à 200 Bq/kg dans de nombreuses municipalités de la préfecture de Fukushima, avec des taux maximum respectivement de 1 300 et 1 100 Bq/kg à Namie et Iitate (11). Comme l’iode-131 a une demi-vie de 8 jours, des mesures aussi élevées 90 jours après les rejets initiaux du 15 mars 2011, suggèrent qu’une contamination supplémentaire de la zone par l’iode-131 a eu lieu postérieurement. De même, le rapport de l’OMS inclut des échantillons de légumes contenant 2 200 Bq/kg d’iode-131 au troisième mois de la catastrophe – une évidence de plus de la poursuite des émissions d’iode radioactif après les explosions initiales (12) – très probablement dues à une fission spontanée ou une nouvelle criticité d’un ou plusieurs réacteurs. Outre l’iode-131, d’autres particules radioactives ont été continuellement émises pendant plusieurs mois. Pas plus tard qu’en janvier 2012, TEPCO a admis que les émissions atmosphériques de césium radioactif atteignaient encore 60 MBq par heure, soit environ 1 440 MBq chaque jour (13).

A ceci s’ajoutent la dispersion continue de particules radioactives issues des travaux en cours dans la centrale de Fukushima Dai-ichi, des fuites répertoriées d’eau radioactive des réservoirs de refroidissement et la contamination radioactive du sol et des eaux terrestres due au nettoyage. Le rapport actuel de l’OMS va même jusqu’à parler d’un « effet de protection » naturel, puisque les particules radioactives telles que le césium-137 sont lessivées dans le sol et il calcule donc une décroissance de l’exposition à la radioactivité au fil du temps (14). Bien que cela puisse se justifier pour le risque externe de radiation, cette hypothèse ne tient pas compte de l’augmentation de l’exposition interne liée au césium-137 radioactif par l’approvisionnement en eau et par la chaîne alimentaire. En Allemagne du sud, le césium-137 radioactif contenu dans les champignons et les sangliers constitue toujours une menace pour la santé, même 25 ans après la catastrophe de Tchernobyl (15 – 16).

4. Le rapport ignore la radiosensibilité accrue de l’enfant en gestation

Les auteurs du rapport déclarent que les niveaux de dose estimés pour la population affectée par la catastrophe de Fukushima étaient trop bas pour toucher au développement du fœtus et ils ont excluent la possibilité de fausse couche, d’augmentation de la mortalité périnatale, de défauts congénitaux ou d’altérations cognitives liés à une exposition in utero (17). Le rapport énonce aussi que les auteurs ont considéré que la radiosensibilité d’un fœtus était équivalente à celle d’un enfant d’un an – une supposition qui ne tient pas compte de la majorité de ce que nous connaissons des facteurs biologiques sur la radiosensibilité. En fait, l’enfant en gestation est le stade le plus sensible de la vie de l’être humain : les taux plus élevés du métabolisme des tissus et de la division cellulaire du fœtus augmentent les possibilités de malignité dues à des mutations avant qu’elles ne puissent être stoppées par les propres mécanismes de régulation du corps. En plus, comme les mécanismes de réparation cellulaire et le système immunitaire du fœtus ne sont pas totalement développés, ces mécanismes de défense ne peuvent pas empêcher le développement du cancer de manière adéquate. La déclaration selon laquelle le fœtus aurait la même sensibilité vis-à-vis de la radioactivité qu’un enfant devient de plus en plus difficile à accepter, lorsque le rapport lui-même énonce que les particules radioactives, telles que l’iode-131 ou le césium-137, atteignent le fœtus par le cordon ombilical dans l’utérus, provoquant une irradiation interne18. Et le fœtus peut en plus être irradié en externe par les isotopes accumulés dans la vessie.

Il est un fait établi depuis longtemps que le fœtus doit être particulièrement protégé de l’irradiation. Les effets des radiations à faible dose sur l’enfant en gestation sont connus depuis les années 50, lorsque l’Enquête d’Oxford sur les cancers infantiles a montré un risque très significativement élevé de leucémie chez les enfants exposés à des diagnostics aux rayons x in utero. Depuis, cette association a été confirmée par de nombreuses études de cas-contrôles (19). La profession médicale a réagi à ces résultats en recommandant de ne pas procéder à des examens radiologiques sur les femmes enceintes et en demandant des aménagements pour les femmes enceintes qui travaillent dans un cadre où elles pourraient être exposées à la radioactivité. Dans le rapport de l’OMS, le fait de ne pas tenir compte de la radiosensibilité élevée du fœtus et de l’enfant nourri au sein et de nier les risques spécifiques pour la santé dans la part la plus vulnérable de la population touchée a conduit à une grossière sous-estimation du risque réel pour la santé (20).

Les auteurs expliquent cette procédure en fondant leurs suppositions sur les Etudes d’une durée de vie (LSS) menées sur les survivants des bombardements atomiques d’Hiroshima et Nagasaki – des études commencées seulement en 1950, cinq ans après les bombardements (21). Les auteurs du rapport ne traitent pas correctement comment des études sur les survivants d’une exposition à une radioactivité essentiellement externe par des bombes atomiques, sans la moindre connaissance scientifique des cinq premières années, ni aucun enregistrement de fausse couche, de mortalité néonatale ou de défaut congénital, pourraient être transposées dans un scénario où les enfants et les fœtus ont été exposés à une radioactivité essentiellement interne après une catastrophe nucléaire.

5. Les résultats cliniques récents n’ont pas été pris en considération

Selon le rapport, « aucune condition clinique n’a été identifiée » comme une conséquence de la catastrophe nucléaire de Fukushima (22). Ni les trois cas de cancer de la thyroïde ni l’augmentation répertoriée de la mortalité infantile à la suite de la fusion des réacteurs nucléaires de Fukushima ne sont signalés dans le rapport. Bien qu’il soit difficile de prouver la causalité et que des recherches supplémentaires soient absolument nécessaires pour étudier la dimension et la cause probable de ces phénomènes, les omettre dans le rapport jette une fois de plus des doutes sur sa neutralité.

Le 13 février 2013, les autorités de la préfecture de Fukushima ont annoncé que trois cas de cancer de la thyroïde avaient été diagnostiqués et que les enfants devaient subir une opération chirurgicale (23 – 24). Aucun détail supplémentaire n’a été publié sur ces trois cas, mais ces résultats sont très inhabituels, alors que les cancers spontanés de la thyroïde sont très rares chez les enfants de moins de 18 ans, surtout lorsqu’ils apparaissent ensemble, comme dans le cas de Fukushima (25). Bien que le rapport concède que l’exposition prolongée à l’iode radioactif puisse provoquer des anomalies de la thyroïde et que même de faibles doses de radiation puissent augmenter le risque de nodules non cancéreux de la thyroïde chez les personnes exposées, une évaluation quantitative de ces phénomènes n’as pas été entreprise (26).

Bien qu’il soit extrêmement difficile de détecter les effets d’une irradiation par faible dose sur une vaste population, une évaluation statistique de la mortalité infantile au Japon a montré des pics marqués en mai 2011 et en décembre 2011, deux et neuf mois après le début de la catastrophe de Fukushima. Une analyse des données de la mortalité infantile en Allemagne de l’Ouest après la catastrophe de Tchernobyl a aussi montré des pics dans le même intervalle de temps après la fusion nucléaire. En décembre 2011, neuf mois après Fukushima, le nombre de naissances vivantes au Japon se situait nettement au-dessous de la moyenne des neuf années précédentes. Un déclin similaire de naissances vivantes avait été trouvé en février 1987 dans les régions d’Allemagne du Sud les plus affectées par les retombées. Dans les deux scénaris, l’effet sur les naissances vivantes semble limité à un seul mois (27). Comme mentionné précédemment, l’évaluation par l’OMS du risque pour la santé énonce précisément qu’aucun impact sur le développement du fœtus ou sur la mortalité infantile n’est attendu, puisque la dose supposée de radiation était bien trop faible pour que de tels effets aient lieu (28). Une autre explication des résultats récents n’est pas proposée dans le rapport et ces résultats ne sont pas non plus intégrés dans l’évaluation finale du risque pour la santé.

6. Les maladies non cancéreuses ne sont pas intégrées dans les calculs du risque pour la santé.

Les effets non cancéreux sur la santé, tels que les maladies cardiovasculaires, la stérilité ou les maladies de la thyroïde ne sont pas évaluées quantitativement dans le rapport. De plus, la possibilité que de tels effets adviennent en tant que résultats de la catastrophe de Fukushima sont totalement ignorés (29). Les auteurs considèrent que seuls les niveaux élevés de radioactivité pourraient produire de tels effets, ne prenant pas en compte la recherche sur les effets de radiation à faible dose (30 – 31).

7. Le rapport s’appuie seulement sur les propres données de TEPCO pour évaluer les risques pour la santé des travailleurs

Le rapport de l’OMS apporte aussi des commentaires sur les risques pour la santé des travailleurs et des entrepreneurs dus à une exposition à la radioactivité. Comme les hypothèses du rapport sont uniquement fondées sur des mesures fournies par TEPCO lui-même – ces estimations ne peuvent pas être considérées comme des évaluations adéquates des risques pour la santé des travailleurs, notamment après que des rapports d’information trompeuse, des relevés falsifiés de dosimétrie et d’autres irrégularités aient sévèrement compromis la validité des données de TEPCO (32 – 33).

8. La neutralité des auteurs du rapport doit être mise en doute

L’une des critiques la plus importante de l’évaluation de dose par l’OMS de mai 2012 était son apparente absence de neutralité. Avec un comité d’experts comprenant principalement des scientifiques associés à l’Agence Internationale de l’Energie Atomique (AIEA) et des membres de corps de régulation nucléaire accusés de collusion avec l’industrie nucléaire, et avec des résultats qui différent aussi nettement d’autres publications de chercheurs indépendants, l’évaluation de dose donnait l’impression d’une tentative de minimisation des effets de la catastrophe nucléaire, plutôt que de constituer une approche scientifique constructive sur la question de l’exposition aux radiations à Fukushima. La raison pour laquelle un rapport, écrit principalement par l’AIEA et les institutions nucléaires collaboratrices, devrait être publié au nom de l’OMS reste peu claire.

Le rapport actuel de l’OMS a de nouveau été composé en grande partie par des scientifiques qui ont un réel conflit d’intérêt. Le rapport n’a pas suivi le processus scientifique habituel d’évaluation par les pairs, et les scientifiques ayant des vues plus critiques sur les effets de la radioactivité sur la santé n’ont pas été invités à rejoindre le comité d’experts. En ce qui concerne la question très pertinente de la leucémie infantile, l’évaluation par l’OMS du risque pour la santé repose grandement sur l’expertise d’un certain Prof. Wakeford, qui est cité en tant qu’expert sur « les effets de la radiation sur les nourrissons et les enfants, notamment sur la leucémie infantile »(34) . Cependant, le Prof. Wakeford a travaillé pendant plus de trente ans pour British Nuclear Fuels Ltd et a été rémunéré pour des consultations chez EDF Energy plc, Augias plc – qui travaille pour le retraitement des déchets, British Nuclear Fuels plc et Sellafield Ltd – une entreprise qui se débat avec l’héritage de nombreux accidents et fuites nucléaires (35). Contrairement au premier rapport de l’OMS sur Fukushima, ces conflits d’intérêt évidents ont été dévoilés dans le nouveau rapport, mais la raison pour laquelle l’OMS, pour une évaluation cruciale d’une catastrophe nucléaire, fait confiance à un scientifique qui a travaillé pour l’industrie nucléaire britannique reste peu claire.

Afin de comprendre pourquoi l’OMS doit se reposer si lourdement sur des experts du secteur nucléaire, il est temps de réitérer que l’OMS est subordonnée à l’AIEA sur les questions de la sûreté nucléaire. Selon les articles 1.3 et 3.1 de « l’Accord entre l’AIEA et l’OMS » de 1959, l’OMS est liée par cet accord et ne peut rien publier de ce qui concerne la radiation sans le consentement de l’AIEA (36). L’AIEA a cependant été créée avec la mission spécifique de « promouvoir des technologies nucléaires saines, sûres et pacifiques » et « d’accélérer et d’élargir la contribution de l’énergie atomique à la paix, la santé et la prospérité à travers le monde » (37). Avec ces mobiles, l’AIEA et ses organismes nationaux ne peuvent pas passer pour des voix impartiales sur l’énergie nucléaire. L’influence de l’AIEA sur le travail de l’OMS a donc été critiqué à juste titre pour son obstruction à une recherche indépendante sur les effets des radiation nucléaires sur la santé.

Conclusion

En tant que médecins et scientifiques, nous sommes tout à fait conscients des difficultés de calcul de l’ensemble des risques d’une grande catastrophe sur une vaste population et nous connaissons les problèmes que soulève naturellement une telle tentative. Il est extrêmement important de fonder de tels calculs sur des données fiables et valables, qui auront été approuvées par un consensus scientifique issu soit d’un comité d’experts impartiaux composé de scientifiques ayant des vues opposées ou d’un processus d’évaluation par les pairs. La possibilité d’une manipulation de données par un groupe, une organisation ou une industrie ayant des intérêts personnels devrait être évitée à tout prix. Les calculs devraient englober toute la population affectée par la catastrophe et porter une attention particulière aux groupes à forte vulnérabilité. Les résultats cliniques devraient être parfaitement évalués et inclus dans les considérations finales. Après une lecture attentive du rapport de l’OMS sur l’évaluation du risque pour la santé, aucune adhésion à ces principes n’est apparente. Les risques réels pour la population de Fukushima et du Japon doivent être évalués par des chercheurs scientifiques indépendants, dénués de tout soupçon de collusion et d’interférence avec l’industrie nucléaire et les organismes de régulation nucléaire. Les tentatives du lobby nucléaire, dont l’AIEA et bien des auteurs de ce nouveau rapport de l’OMS, de minimiser les effets de l’émission permanente d’isotopes radioactifs dans l’air, le sol et l’eau au moyen d’évaluations douteuses du risque doivent être rejetées par les scientifiques, les médecins et les politiques, dans le souci primordial de fournir aux personnes touchées des recommandations et un soutien appropriés. Ce dont l’OMS a besoin est de retrouver son indépendance dans l’évaluation des risques pour la santé liés aux radiations et de réaffirmer sa demande d’être guidée uniquement par son souci de la santé de la population et non par les intérêts d’une industrie spécifique.

“Lire le communiqué de presse de l’OMS à propos de ce rapport de février 2013”

“Lire le rapport de l’OMS (en anglais)”

1 OMS. Evaluation du risque pour la santé dû à l’accident nucléaire après le tremblement de terre et le tsunami du grand Est du Japon, fondé sur une estimation préliminaire de dose, 28.02.2012

2 OMS. Estimation préliminaire de dose sur l’accident nucléaire après le tremblement de terre et le tsunami du grand Est du Japon, 23.05.2012

whqlibdoc.who.int/publications/2012/9789241503662_eng.pdf

3 Rosen, A.. “Analyse du rapport de l’OMS sur la catastrophe de Fukushima , 03.08.2012”

4 Rosen 2012.

5 OMS 2013. p. 52.

6 Lengfelder, E et al. « 10 ans de programmes d’aide à Tchernobyl de l’Institut de traitement des radiations Otto Hug projeets de recherche sur le cancer de la thyroïde au Bélarus. 3ème Conférence internationale : effets sur la santé de l’accident de Tchernobyl : résultats de 15 années de suivi. 4-8 juin 2001, Kiev, Ukraine », Internat. J. Radiat. Med. 3, 73, 2001.

7 Weiss, D., Contamination de l’eau, des sédiments et du biotope de la zone littorale du Pacifique Nord à proximité de Fukushima

NPP”, Gesellschaft für Anlagen- und Reaktorsicherheit, Berlin. 31.10.2011.

www.eurosafe-forum.org/userfiles/2_2_%20paper_marine%20environment_Fukushima_20111031.pdf

8 JAIF. « Rejets radioactifs dans la mer estimés du triple », Forum d’information atomique du japon ; Rapport 199 sur le tremblement de terre, 09.09.2012

www.jaif.or.jp/english/news_images/pdf/ENGNEWS01_1315542569P.pdf

9 IRSN, “Synthèseactualisée des connaissances relatives à l’impact sur le milieu marin des rejetsradioactifs du site nucléaire accidenté de Fukushima Dai-ichi“, 26.10.2011.

www.irsn.fr/FR/Actualites_presse/Actualites/Documents/IRSN-NI-Impact_accident_Fukushima_sur_milieu_marin_26102011.pdf

10 Les chercheurs évaluent la radioactivité rejetée dans l’Océan par la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi, Institution océanographique Woods Hole, 06.12.2011

www.whoi.edu/page.do?pid=7545&tid=282&cid=123049&ct=162

11 Ministère de l’Education, de la culture, des sports, des sciences et de la technologie (MEXT). Lectures de surveillance des sols”, 07.08.2011

eq.wide.ad.jp/files/110806soil_1000.pdf

12 OMS 2012, Tableau A8.2, p. 106.

13 TEPCO. “Situation actuelle de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi », 27.01.2012

www.tepco.co.jp/en/nu/fukushima-np/f1/images/f12np-gaiyou_e_3.pdf

14 OMS 2013, p. 41.

15 BMG.

« Contamination radioactive du sanglier », Ministère allemand de la santé,

bmg.gv.at/home/Schwerpunkte/VerbraucherInnengesundheit/Radioaktive_Belastung_von_Wildschweinen)

16 Hawley, C., « Un quart de siècle après Tchernobyl : le sanglier radioactif en hausse en Allemagne », Spiegel Online, 30.07.2010.

www.spiegel.de/international/zeitgeist/a-quarter-century-afterchernobyl-radioactive-boar-on-the-rise-in-germany-a-709345.html

17 OMS 2013, p. 8, 67.

18 OMS 2013, p. 18, 140.

19 Agence internationale de recherche sur le cancer, « Rayons X et gamma et neutrons. Irradiation à l’iode » dans : Monographies sur l’évaluation des risques cancérogènes chez les humains », Volume 75, 1999.monographs.iarc.fr/ENG/Monographs/vol75/mono75.pdf

20 OMS 2013, p. 30.

21 Preston DL et al. « Fréquence du cancer chez les survivants des bombes atomiques. III. Leucémies, lymphomes et myélomes multiples., 1950-1957 »

22 OMS 2013, p. 27.

23 « 2 cancers supplémentaires identifiés à Fukushima », Kyodo News, 13.02.2013. english.kyodonews.jp/news/2013/02/209091.html

24 « 2 cancers supplémentaires identifiés à Fukushima », Mainichi Newspaper, 13.02.2013.
mainichi.jp/english/english/newsselect/news/20130213p2g00m0dm091000c.html

25 Albright JT et al. « Tumeurs malignes de la tête et du cou chez l’enfant :

fréquences et tendances sur deux décennies. »

Archives de la chirurgie d’otorhynolarhyngologie de la tête et du cou, juin 2002;128(6), p. 655-9.

26 OMS 2013, p. 22,67.

27 Körblein, A. « Mortalité infantile au Japon après Fukushima. », Strahlentelex, No. 622-623, 6.12.2012.
www.strahlentelex.de/Infant_mortality_in_Japan_after_Fukushima.pdf

28 OMS 2013, p. 8, 67.

29 OMS 2013, p. 67.

30 Yablokov A et al. Tchernobyl – Conséquences de la catastrophe sur la population et l’environnement, Annales de l’Académie des Sciences de New York, Volume 1181, Décembre 2009. bi t.ly/mo29TZ

31 Little MP et al. « Un modèle de maladie cardiovasculaire donnant un mécanisme plausible de l’effet d’une exposition fractionnée à une irradiation ionisante à faible dose ». PLoS Comput Biol. Octobre 2009; 5(10). www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC2759077

32 « 63 travailleurs exposés à des radiations supérieures à celles enregistrées dans leurs archives. », Asahi Shimbun, 02.03.2013. ajw.asahi.com/article/0311disaster/fukushima/AJ201303020048

33 « Un sous-traitant de TEPCO a utilisé du plomb pour falsifier les relevés de dosimètres à la centrale de Fukushima »Asahi Shimbun, 21.07.2012.

ajw.asahi.com/article/0311disaster/fukushima/AJ201207210069

34 OMS 2013, p. 120.

35 OMS 2013, p. 120.

36 OMS. « Accord entre l’Agence Internationale de l’Energie Atomique et l’Organisation Mondiale de la Santé, site Web de l’OMS

apps.who.int/gb/bd/PDF/bd47/EN/agreements-with-other-inter-en.pdf

37 AIEA. « des atomes pour la paix », site Web de l’AiEA Website. www.iaea.org/About/

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